Date: jeu. 12 mars 2015 00:12:30
Les aumôniers militaires et la création de la Chapelle Saint-Michel
Les premiers aumôniers militaires - cinq franciscains - arrivent au Maroc en janvier 1908 à titre d'aumôniers bénévoles auprès des troupes du corps expéditionnaire.
Leur situation est inconfortable : ils sont envoyés par l'Aumônerie militaire coloniale libre mais ils ne sont pas accrédités auprès du corps expéditionnaire. Ils suivent les colonnes qui vont vers l'intérieur du pays et doivent négocier leur présence auprès des autorités militaires locales. Peu à peu ils trouvent leur place et sont acceptés dans les hôpitaux où en dehors de leur ministère religieux ils rendent de petits services aux malades et aux blessés qu'ils ravitaillent en tabac, encre et papier à lettres, journaux etc.. Ils écrivent aussi aux familles pour donner des nouvelles, bonnes ou mauvaises.
Le général d’Amade autorise deux aumôniers en Mars 1908, à suivre les colonnes et leur accorde pour leur service une tente marabout, une ordonnance et une araba. Ils auront même pour eux une tente « officier ».
L’aggravation de la situation dans la région de Fès en 1911, conduit le gouvernement français à envoyer le corps expéditionnaire au secours de Fès sous le commandement du général Moinier. Dans ce contexte et en présence des nouveaux dangers courus par le corps expéditionnaire français les aumôniers militaires, cette fois-ci, sont intégrés à la colonne ; s'ils ne furent pas sollicités par le gouvernement lui-même ils le furent du moins, d’un commun accord, par les autorités religieuses.
A la mi-mai 1911 quatre aumôniers franciscains volontaires furent envoyés au Maroc : les Pères Michel Fabre, Julien Graciette, Laurent Philippe et Dominique Bouchery. Ils débarquent à Casablanca le 8 juin 1911.
Les Pères Michel Fabre et Julien Graciette sont désignés pour Meknès. Le Père Michel rejoint Fès dès le 26 décembre 1911. Après avoir planté sa tente pendant un mois au camp de Dar Debibagh, il trouve en médina une chambre avec un jardinet et une pièce assez vaste qu’il utilisait à l’occasion comme chapelle. Il prend ses repas, avec quelques sous-officiers des tabors et quelques employés civils au restaurant de l’Hôtel de France.
Le Père Michel a la charge des 5 000 hommes de la garnison, des malades de l’hôpital et d’un petit groupe de civils.
On note pendant son ministère un baptême le 23 mars (enfant Campini). Le 19 mars il avait présidé, dans les jardins de l’hôpital Auvert, aux funérailles d’un officier assassiné en plein champ de manoeuvres. Il assure une deuxième inhumation le 12 avril 1912.
Le dimanche des Rameaux, le 31 mars, il a le plaisir de voir une partie des membres de l’Ambassade ( Régnault était à Fès depuis le 24 mars pour signer le 30 mars le traité de Protectorat) se joindre aux fidèles habituels, pour assister à la messe. La « petite histoire » révèle que prévenu de cet afflux inhabituel de fidèles, le Père Michel avait emprunté pour eux des chaises à l’Hôtel de France de Mme Imberdis !
On ne reviendra pas sur l’assassinat par les émeutiers du Père Michel le 17 avril 1912 , à l’Hôtel de France, où à son habitude il avait été prendre son repas du midi.
(cf [
adafes.com])
Il fut enseveli provisoirement dans la fosse commune (son corps portait le numéro 13) avec les victimes des émeutes de Fès.
C’est le Père Dominique Bouchery qui lui succède à Fès. Le 30 juillet 1912, le Père Dominique reçoit un « auxiliaire » le Père Théophile Malaussena.
Ils ont la préoccupation de créer une résidence pour les aumôniers, et plus encore, une chapelle un peu moins provisoire qu’un autel en plein air.
« Non loin de l’hôpital Auvert, à peu près au centre des diverses administrations françaises et du quartier habité par la colonie européenne, une maison arabe était disponible, écrit le Père Dominique. Dans cette maison, le 17 avril, trois télégraphistes avaient été massacrés par les émeutiers ; un quatrième avait été laissé pour mort. L’étroite chambre où ils s’étaient réfugiés est encore rougie de leur sang, les boiseries sont criblées de balles et calcinées par la flamme qui les a asphyxiés … »
Ces souvenirs ne pouvaient qu’encourager le Père à se fixer là : il le fit. Une salle assez spacieuse du rez-de-chaussée pouvait devenir une chapelle. Quand l’assistance déborderait ce local, le patio dallé de marbre, couvert, serait utilisé …
Le 10 septembre 1912, la maison désormais historique, est devenue sous le vocable de Saint Michel, en souvenir du Père Fabre, le centre du culte catholique de Fès. La charité française et belge, le concours de l’Aumônerie Militaire Coloniale, le travail des aumôniers, ont pourvu à la décence de la petite chapelle et aux nécessités les plus urgentes de l’oeuvre franciscaine à Fès. Le général Gouraud a offert l’autel de la chapelle.
Une « pauvre » croix , suspendue au dessus de la porte signalait la petite chapelle aux passants extérieurs, le plus souvent des musulmans étonnés de voir que le Dieu des chrétiens habitait une demeure profane.
Parallèlement à leur ministère d’aumôniers militaires, les Pères Dominique et Théophile ont organisé la vie paroissiale à Fès et toutes les familles catholiques, parents, enfants, malades ont apprécié leur activité et leur dévouement.
A vrai dire, le Père Dominique avait une grande partie de son temps consacrée aux activités militaires: en six ans passés à Fès il prit part à trente-six opérations, combats ou colonnes. Le Père Théophile était davantage le curé résidant.
Avec l’expansion de la population catholique, le patio devint trop petit ! et le Père Théophile Lamperti qui succéda au Père Théophile Malaussena dût accepter la division de sa paroisse en deux, et la fondation d’un lieu de culte plus proche de la ville nouvelle qui se développait. L'église St François sera achevée en 1921.
La chapelle a fermé en 1957 et est redevenue une « demeure profane ».
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Photo d'une des premières messes célébrée dans la chapelle. Je n'ai pas la date exacte,au verso il est inscrit 22 septembre (1912 ? ) avec ce commentaire " Je t'envoie la photographie de la messe où j'étais dimanche chez le Père Dominique. Mais ce n'est pas lui qui la dit , c'est le Père Théophile "
Il est probable qu'il s'agisse des deux premiers aumôniers Bouchery et Malaussena, et donc d'une des premières photos de la chapelle
1 modifications. Plus récente: 12/03/15 09:35 par georges-michel.