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Le Père Michel FABRE
Envoyé par: georges-michel (Adresse IP journalisée)
Date: jeu. 16 décembre 2010 00:01:28

Nous avons souvent évoqué le Père Michel Fabre, tué pendant les événements d'avril 1912 à Fès et la chapelle Saint MICHEL qui fut la première église stable de la ville. J'ai trouvé quelques informations sur la vie du père Fabre qui pourront intéresser les plus curieux d'entre nous !

Michel Fabre de son vrai nom Cyprien-Marius Fabre est né le 25 novembre 1880, à Monclarat, dans le Rouergue. Son père, Pierre Fabre, et sa mère, Eugénie Pujol, étaient des aveyronnais «  de vieille race et des chrétiens de vieille foi ». La famille était relativement pauvre même si les Fabre étaient propriétaires d'une maisonnette modeste et de quelques terres alentours qui ne suffisaient pas aux besoins de leur nombreuse famille. Le père était berger de troupeaux de brebis qui paissaient dans les bruyères parfumées du Larzac....pas encore occupé par les militaires et les écolos.

La mère élevait ses 5 enfants et travaillait le petit domaine environnant. Cyprien était le dernier d'une fratrie de 6 composée de 4 filles et 2 garçons ( en fait ils ne furent au maximum que 5 vivants car la troisième fille Louise-Emilie est morte à l'âge de 2 ans et a été « remplacée » par une autre fille, qui portait d'ailleurs le même prénom). Cette dernière fille entre dans les ordres et les 2 garçons « échappent au monde » en devenant franciscains.

Cyprien bien plus jeune que ses aînés tenait compagnie à sa mère et était très attaché à elle. Il est décrit comme un enfant compatissant et bon, ne tolérant pas de voir pleurer les enfants de son âge, dévoué, sage et pieux. Très tôt il devient enfant de choeur à l'église paroissiale et accompagne le curé dans ses visites aux malades. Cependant il est aussi un grand bout-en-train et un intrépide joueur.

Il fréquente l'école primaire mixte du Nouzet, petit hameau proche de Montclarat. L'école est tenue par une « digne institutrice, capable et judicieuse, mais surtout , chrétienne convaincue et pratiquante ».

En 1885, le plus âgé des 2 frères-12 ans- postule pour entrer au Collège Séraphique ( de l'ordre des franciscains) de Bordeaux. Ces médiocres aptitudes intellectuelles ne lui permettent pas un accès direct au séminaire mais il réussira finalement à devenir franciscain en Terre-Sainte.

Les lettres de son frère et de sa soeur religieuse, missionnaire en Grèce, l'environnement particulièrement pieux dans lequel il évolue ,amènent Cyprien à 12 ans vouloir devenir lui aussi missionnaire. Doté de bonnes facultés intellectuelles il est admis, en 1893, au Collège Séraphique de Bordeaux où il fait 5 ans d'études. Ce collège est réservé à ceux qu'attirent la vie et les missions franciscaines.

Il entre ensuite au Noviciat à Pau et devient frère Michel le jour de sa prise d'habit en août 1898. Il est apprécié sans se faire remarquer: rien d'extraordinaire ne le signale à l'attention de ses supérieurs qui n'ont jamais eu le moindre reproche à lui faire. Un an plus tard il prononce ses voeux et part pour Béziers pour faire des études de philosophie et continuer sa formation franciscaine avec le désir de partir comme missionnaire en Chine.

Il doit auparavant accomplir son service militaire et fin 1901, le Frère Michel est incorporé pour 3 ans au 158ème d'infanterie alpine à Lyon, comme simple soldat et non comme aumônier.

A l'issue il rejoint Fribourg en Suisse pour suivre des cours à l'Université Catholique. En octobre 1905 il prononce ses voeux définitifs et solennels et sera ordonné prêtre en août 1907. Il termine à Fribourg ses études de théologie, et suit 2 années de préparation à la prédication. Il assure également des fonctions d'enseignant

En mai 1911 il est désigné pour le Maroc comme aumônier militaire et doit partir dans les 3 jours, sans pouvoir aller revoir ses parents. «  Mon père et ma mère! Ah si vous les connaissiez ! Ce sont de si bons chrétiens ! Ils seraient heureux si je mourrais en martyr » dit-il à son supérieur qui lui demande quelle sera la réaction de ses parents en apprenant son départ.

Il arrive à Casablanca le 8 juin 1911. La situation des aumôniers militaires à cette époque est inconfortable: ils sont envoyés par l'Aumônerie militaire coloniale libre mais ils ne sont pas accrédités auprès du corps expéditionnaire. Ils suivent les colonnes qui vont vers l'intérieur du pays et doivent négocier leur présence auprès des autorités militaires locales. Ils ne sont pas autorisés à entrer dans les hôpitaux de campagne s'ils n'ont pas été demandés par le malade lui même et le Père Michel raconte une anecdote où il est réveillé en pleine nuit par un médecin de l'hôpital lui demandant de venir assister un de ses patients, déjà inconscient et qui va mourir. « Je ne peux pas vous laisser entrer dans l'hôpital puisque les règlements le défendent; il faut vous le savez que le malade ait demandé lui-même le prêtre. Mais vous pourrez l'absoudre par la fenêtre, il se trouve tout à côté » ! Et le lendemain un officier vient lui demander de faire l'enterrement du malade mort la veille.

Peu à peu les aumôniers – ils ne sont que 2 en 1911 - trouvent leur place et sont acceptés dans les hôpitaux où en dehors de leur ministère religieux ils rendent de petits services aux malades et aux blessés qu'ils ravitaillent en tabac, encre et papier à lettres, journaux etc.. Ils écrivent aussi aux familles pour donner des nouvelles, bonnes ou mauvaises.

Le Père Michel après quelques mois à Meknès, prenait la route de Fès le 26 décembre 1911 et il arrive le 29 décembre. Il va dans un premier temps voir comment il peut exercer son ministère à Fès car si une certaine tolérance s'était établie concernant la présence des aumôniers, elle dépendait toujours du bon vouloir des autorités militaires, qui elles-mêmes pouvaient se trouver en difficulté en acceptant la présence d'aumôniers non officiellement accrédités.
Il fallut attendre le 13 février 1912 pour que M.Millerand , ministre de la guerre autorise les aumôniers à accomplir leurs fonctions auprès des armées et plus particulièrement pour le Père Michel Fabre à l'hôpital Auvert.

Le père Michel, dans sa correspondance avec ses supérieurs de Fribourg, écrit qu'à cette époque (hiver 1912) l'hôpital est presque vide, occupé uniquement par quelques soldats indigènes. Il ajoute qu'au printemps il n'en serait pas de même car on attendait de nombreux colons français et les troupes afflueraient pour marcher sur Taza et ouvrir la route de l'Algérie.

La situation à Fès en cette fin d'hiver est plus tendue; des rumeurs circulaient sur la signature du traité de protectorat ce qui inquiétait certains milieux marocains. Un jour de mars un soldat marocain tue un officier français en plein champ de manoeuvres et le 19 mars 1912 le Père Fabre faisait son premier enterrement à Fès.
Fin mars on se bat au sud , du côté de Sefrou et il y a de nombreux blessés.

Le père Fabre apprenait le 10 avril que sa mère était décédée dix jours avant la veille des Rameaux ( son père était décédé le 28 septembre 1911) et il en fut particulièrement atterré. On sait l'attachement que le jeune Cyprien Fabre avait pour sa mère et dans une lettre adressée au directeur du collège séraphique le 16 avril 1912 le Père Michel évoque « cette nouvelle épreuve » pour lui: «  je bénis la main de Dieu qui nous éprouve si cruellement, et lui offre ce nouveau sacrifice pour la conversion de ce Maroc infidèle, qui m'enlève la consolation de revoir mes parents vivants sur cette misérable terre ».

Et c'est le lendemain 17 avril 1912 que le Père Michel Fabre sera tué lors de la révolte de certains askris de la Casbah des Cherarda. «  Vers 13h15, les troupes chérifiennes révoltées, se dirigèrent vers l'hôtel français où prenait ses repas le P.Michel en compagnie de plusieurs de ses compagnons...... la propriétaire de l'hôtel, Mme Imberdis, se précipita pour fermer la porte, et juste à ce moment rentra le capitaine de Fabry qui était poursuivi par les soldats révoltés. Mme Imberdis eut le temps de fermer la porte et reçut au travers de celle-ci une balle qui la tua.

Les assaillants commencent à enfoncer la porte menant à l'étage où s'étaient réfugiés les français présents dans l'hôtel. « Le P. Fabre proposa de descendre pour essayer de calmer les assiégeants, pas un de nous n'eut l'idée de l'en empêcher. Il descendit donc et il se nomma aux soldats en disant Marabout, Marabout...C'est juste à ce moment que la porte céda. Nous n'avons pas entendu un cri; et c'est seulement le soir à 5 heures, en tentant une reconnaissance, que nous avons trouvé son cadavre dans la cour, à quatre mètres de l'escalier. Il avait la gorge tranchée, et plusieurs coups de poignard. Son habit avait été enlevé ».

«  Il est descendu de son refuge, s'exposant à une mort certaine, pour tenter de calmer les assaillants et donc pour sauver ses compagnons. Il a fait cela par un mouvement de noble charité, mais simplement , naturellement, comme il avait l'habitude de faire toutes choses ».

Il n'avait pas encore 32 ans.

Pour certains il est mort en martyr comme il l'avait souvent souhaité. Il ne m'appartient pas de dire si c'est là être un martyr mais je ne peux m'empêcher de relever le contexte dans lequel le Père Michel est mort: il venait d'apprendre le décès de sa mère tant aimée. Aurait-il eu la même conduite dans un autre contexte ? Personne ne peut le dire.

Ceci n'enlève rien à son courage et à la valeur de son geste.

C'est à la demande de Lyautey que fut donné le nom de Saint Michel, en hommage au sacrifice du Père Michel Fabre, à la chapelle bâtie dans l'ancienne maison des télégraphistes dont plusieurs périrent lors de ces événements d'avril 1912.

Pièces jointes: Michel Fabre a.jpg (516.2KB)  
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Re: Le Père Michel FABRE
Envoyé par: BISBIS (Adresse IP journalisée)
Date: sam. 18 décembre 2010 02:33:17

Salut Georges,
Comme toujours un régal de lire cette vie du père Fabre, et comment ferions-nous sans ta culture et ta soif de recherches dans les Bibliothèques !! Merci encore à toi !! DANY

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Re: Le Père Michel FABRE
Envoyé par: tamerl (Adresse IP journalisée)
Date: dim. 19 décembre 2010 22:18:08

Le père M. Fabre n'a pu effectuer que deux sépultures et un baptême avant son décès tous trois enregistrés à la Chapelle Saint Michel
La 1ere inhumation le 20 mars 1912 au cimetière de Dar Debibagh de Guillasse Charles, Edouard né à Sezanne (Marne) le 2/02/1880 et tué à Fez le 18/03/1912
La 2ème inhumation le 12 avril 1912 au même cimetière de Couchenay Henri, Alfred né le 4/01/1889 à Sermevoy le Haut (Yonne) décédé à l hôpital militaire le 11/04/1912
Ces deux actes sont signés P. Michel Fabre et pour copie conforme contresignés P. Théophile Malausséna
Le baptême a été célébré le 23/03/1912 pour un enfant né à Fez le 3/03/1911 il est signé Père Michel Fabre aumonier militaire franciscain et contresigné pour copie conforme par P. Théophile Malausséna accr. Mr Libre

Le 3ème acte de sépulture de la chapelle Saint Michel est ainsi rédigé '' N° 3 Victimes de l'Insurrection de Fez, 17-20 Avril 1912''
'' L'an du Seigneur 1912, le 6 mai, ont été célébré solennellement , à l'hôpital ''Auvert'', les obsèques des victimes de l'insurrection de Fez, 17-20 Avril, dont les noms suivent :
R.P. Michel Fabre, franciscain, aumonier militaire.
Capitaine de Lesparda,-Capit. Cuny,-Capit.Maréchal, -Capit. de Laveune de la Montoise, -Capit.Rouchotte, -Sous-Intendant Lory, -Lieut. Avril, -Lieut. Rossini, -Lieut. Benaly, -Officier d'administration Marinil, -Lieut. Lapart, -Sergent Possuèls, -Sergent Cocard,-Maréchal des logis Macaigne, Capt. Bourdonneau, -Lieut. Renauld, -Caporal Bonnet, -Soldat Lasserre, -Mr et Mme Bringand, -Mme Imberdis,-Mr Bengi, -Mr Montet, -Mr Decanis, -Mr Mingat, -Mr Ricard.''
Soit 27 personnes signé P. Dominique Bouchery
pour copie conforme P. Théophile Malausséna Franciscain accr. Mgr

Ces enregistrements sont les premiers témoignages de la présence de la communauté catholique de Fez.
Gilles Demmerlé

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Re: Le Père Michel FABRE
Envoyé par: georges-michel (Adresse IP journalisée)
Date: lun. 20 décembre 2010 00:51:33

Bonsoir Gilles,

merci pour ses informations concernant les 2 enterrements et le baptême effectués par le père Michel Fabre avant sa mort le 17 avril à Fès.

Il me semble me souvenir que le baptisé était un fils Campini, dont le père était le responsable de la mission italienne. Pourrais-tu nous le confirmer.

D'autre part la chapelle St Michel n'existait pas avant le décès du Père Michel Fabre et à son emplacement était installée la maison des télégraphistes. Dans les documents que tu as photographiés as tu trouvé la date de l'ouverture de cette chapelle qui est effectivement la première chapelle de Fès au 20ème siècle.

Dans un des courriers adressés par le Père Fabre à ses supérieurs du collège séraphique de Fribourg, il écrit, courant février 1912, qu'après avoir séjourné pendant un mois dans l'unique hôtel existant ( probablement l'hôtel de France de Mme Imberdis près du talaa) il loue un logement à un musulman " j'ai donc 2 pièces; une assez grande pour contenir une centaine de personnes; l'autre, plus petite me servira de chambre. IL y a aussi un petit jardin. Il ajoute que le loyer est trop cher, 140 francs pour un mois et qu'il n'aurait pu s'engager si une personne charitable ne s'était offerte pour payer le loyer.

Il a célébré en mars 1912 plusieurs messes dominicales dont celle du 24 mars qu'il dit un peu plus tôt afin de pouvoir se rendre avec la colonie française à la réception de M.Régnault, représentant officiel de la France, et celle des Rameaux mais sans en préciser le lieu.

Le Père Dominique BOUCHERY qui était aumônier à Rabat arrive à Fès le 29 avril pour remplacer le Père Michel Fabre. Le 6 mai 1912,une cérémonie est organisée " auprès de la fosse où reposent quarante cinq des victimes du massacre, au milieu desquelles le P.Michel". C'est le père Julien Graciette, aumônier à Meknès qui célèbre la messe et le père Dominique Bouchery donne l'absoute.

Le Père Julien avait quitté la France en même temps que le Père Michel et ils avaient toujours été ensemble au Maroc, jusqu'au 26 décembre 1911 où le P.Michel rejoint Fès. Initialement c'était le P.Julien Graciette qui aurait dû rejoindre Fès.

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Re: Le Père Michel FABRE
Envoyé par: tamerl (Adresse IP journalisée)
Date: lun. 20 décembre 2010 10:29:25

Bonjour Georges,

Tu as une excellente mémoire, le baptême est bien celui du fils Campini, il est écrit :
''EGLISE de St Michel Fez (MAROC)
Acte N° 1 BAPTEME DE Campini Amédéo, Paul Marius Félicissimus
L'an 1912, le 23 Mars je soussigné Père Michel Fabre aumonier militaire de cette Paroisse ai baptisé un enfant né à Fez (Maroc) le 3 Mars 1911 fils de Joseph Campini et de Marguerite, Léonie Lequel enfant a reçu les noms de Amédéo, Paul Marius Félicissimus
Le parrain a été Félicissimus Bénino
La marraine Olga Campini soeur du baptisé''
suivent les signatures des pères Fabre et Malausséna comme dit précédemment.
On peux s'étonner de l'année qui sépare la naissance et le baptême alors qu'à cette époque la règle ne devait pas dépasser 5 jours sous peine d'amende, de courroux séculier et même d'excommunication mais les circonstances de cette conquète et des évènements ont du modifier cette règle..
Pour la date d'ouverture de la chapelle Saint Michel la question est plus difficile il va falloir se livrer a une analyse graphologique ou même ''archéologique'' des écritures car aucun registre ne mentionne d'historique de la paroisse ou du lieu d'enregistrement des actes...a suivre
Gilles

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Le Père Michel Fabre
Envoyé par: yanou (Adresse IP journalisée)
Date: lun. 20 décembre 2010 10:49:07

Bonnes Fêtes à toutes et tous .



3 modifications. Plus récente: 24/12/10 16:50 par yanou.

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Re: Le Père Michel FABRE
Envoyé par: tamerl (Adresse IP journalisée)
Date: lun. 20 décembre 2010 11:14:30

Georges,

Il faut savoir que le registre des premières sépultures ne porte pas de nom de paroisse ou lieu d'enregistrement; sur la couverture il est inscrit à la main ''Sépultures 1912-1913-1914-1915-1916'' de même que sur les actes jusqu'en 1916 il n'est rien indiqué, seul le registre des baptêmes porte ''PAROISSE de'' en imprimerie et ''St Michel'' inscrit à la main
De l'acte 1 à l'acte 53 la mention ''St Michel'' est incrite à l'encre noire alors que tous les actes sont rédigés en encre bleue, le premier du père Fabre et tous les autres du père Malausséna; de l'acte N° 53 au N° 57 la paroisse et l'acte sont rédigés de la même main celle du P. Malausséna en encre bleue; à partir de l'acte N° 57 tous les actes et leur entête sont rédigés en encre noire toujours de la même main celle du père Malausséna. L'écriture ''St Michel'' des actes 1 à 53 est de la même main que celle des actes suivants.
On peux en déduire mais sans certitude que l'acte 53 du 3/05/1917
est probablement le premier enregistré à la Chapelle Saint-Michel et que le père à rattrapé les actes précédents de l'inscription ''St-Michel''
Je te confirme que seuls 27 personnes sont enregistrées pour la ceremonie du 6 mai il y a encore les victimes des 26 et 26/05/1912 au nombre de 10 et 3 victimes militaires tuées au combat le 1 juin
As tu une idée de l'identité des 18 victimes non enregistrées sur les 45 que tu cite ou de leur religion ?
Gilles

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Re: Le Père Michel FABRE
Envoyé par: georges-michel (Adresse IP journalisée)
Date: lun. 20 décembre 2010 18:00:24

Merci Gilles pour ces nouvelles précisions.
Plusieurs sujets:
- le nombre de victimes provisoirement inhumées dans les jardins de l'hôpital Auvert. Sur la plupart des documents que j'ai ( ou pu voir), on parle de 44 ou 45 cercueils, recouverts de drapeaux français, de victimes civiles et militaires qui reposaient au fond d'une grande fosse. Il est également précisé que les autres corps avaient été transportés à Dar-Debibagh où, quelques jours après la cérémonie du 6 mai à Auvert, a eu lieu une seconde cérémonie.
Dans les mêmes documents il est fait état de 65 morts civils ou militaires français ou marocains. On peut penser que la quinzaine de noms non mentionnés sur la liste des sépultures de la chapelle St Michel sont probablement des militaires marocains ou musulmans, non rebelles, servant dans les unités engagées pour venir à bout de l'insurrection.
Je n'ai pas d'information sur le lieu où est inhumé le Père Fabre: initialement et de façon provisoire à Auvert. Il a ensuite probablement été transféré au cimetière de Dar Debibagh comme la grande majorité des tués d'avril 1912. Dar Mahrès n'existait pas encore ( premières inhumations vers 1917) et il n'y avait aucune raison pour que le Père Fabre soit enterré au cimetière international (en plus j'ai la liste d'époque et il n'y figure pas!).
Par contre, il existe une tombe des Pères franciscains au cimetière de Dar Mahrès avec seulement 2 noms: Le Père Michel Fabre et le Père Philippe Pimbert aumônier des scouts de France, mort au début des années 30.
Question: est-ce que le cercueil du Père Fabre a été transféré à Dar Mahrès ou est ce une simple mention de rappel?

Je n'ai toujours pas trouvé de renseignement sur ce que sont devenues les tombes de Dar Debibagh.

- Le fait que le petit Campini n'ait été baptisé qu'un an après sa naissance en contradiction avec les habitudes de l'époque, n'est pas surprenant. Il n'y avait pas (ou plus) de prêtre à Fès en 1911: après la Guerra de Africa entre l'Espagne et le Maroc et l'occupation de Tétouan, le traité d'armistice conclut entre les 2 pays en avril 1860 imposa l'acception par le Maghzen d'édifier 2 églises espagnoles, l'une à Fès l'autre à Tétouan, et de faciliter aux prêtres l'exercice de leur tâche. J'ai 2 pistes pour localiser cette première église de Fès.....mais pas de certitudes pour l'instant. C'est la mission franciscaine espagnole qui assura la présence religieuse, pour quelques années seulement à Fès mais elle resta très active sur le littoral méditérranéen.
Même si les franciscains espagnols considéraient le Maroc comme une chasse gardée, le premier « Frère Mineur français » franciscain « aumônier militaire bénévole » débarque en février 1908, au moment de la campagne du corps expéditionnaire français en Chaouia, un autre en 1910 à Oujda et 2 en juin 1911 (les Pères Fabre et Graciette ). Lyautey favorisa ensuite l'implantation de l'église franciscaine française pour éviter que les franciscains espagnols n'utilisent leur implantation à des fins politiques....espagnoles et pour empêcher l'installation d'un clergé séculier colonial dont il avait fait l'expérience en Algérie et qu'il n'appréciait pas: « dès qu'un curé a couché avec sa bonne, compromis une religieuse ou mis à mal un enfant de choeur, on l'envoie aux colonies ». !

- pour les registres je pense comme toi qu'il y a eu une régularisation à postériori pour les sépultures et le baptême effectués par le P. Michel Fabre.Le 2ème et dernier enterrement fait par le P.Fabre l'a été le matin même de sa mort. Il n'a certainement pas eu le temps de remplir les papiers. Je suis à peu près certain que la chapelle, au moins dans une forme sommaire date de septembre 1912 ( j'ai pas recherché mes sources).J'ignore pourquoi les autres registres ont été apparemment remplis plus tard.

L'église St François doit dater de 1923 mais tu as peut-être la date exacte.

Merci pour tes interventions et bonnes fêtes de fin d'année
Georges

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Re: Le Père Michel FABRE
Envoyé par: tamerl (Adresse IP journalisée)
Date: mar. 21 décembre 2010 08:32:54

Bonjour Georges,

Merci Georges pour toutes ces précisions historiques qui semblent inépuisables
La régularisation des actes portent pour les naissances surtout sur ceux du père Malausséna actes N° 2 à 52 ce qui permets d'affirmer par l'écriture qu'elle est bien de la main de la même personne
Le premier acte de mariage de l'Eglise Saint-François date du 18/10/1921
Amicalement
Gilles

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Re: Le Père Michel FABRE
Envoyé par: BISBIS (Adresse IP journalisée)
Date: mar. 28 décembre 2010 01:28:06

Salut les Fassis ,
Quelle joie de vous lire encore ici en ces veilles de Fêtes de fin 2010 !! Cela prouve que les chercheurs d'infos que vous êtes, vont chercher loin les détails de la vie de tous ceux qui ont fait notre ville de Fès !!
Quand je pense que mon père lui est arrivé à Fès en 1912 à l' âge de 6 mois dans le bat du mulet, depuis Colomb-Béchar avec mes Grands-parents! Je ne me lassais pas d'entendre ma grand-mère parler de cette époque et de ce voyage mémorable pour arriver à Fès, mais trop petit en 48 (J'avais 4 Ans) pour me souvenir de ces faits lointains et que je comparais plus tard à la conquête de l'Ouest !!
Le temps pour eux ne comptait guère et le seul but, aller au bout du voyage sain et sauf comptait !!
Nous, nous plaignons d' une heure de retard en train, ou d'une coupure d' électricité et oublions ce que nos parents (presque tous autodidactes !!) ont vécus pour devenir des hommes et des femmes dignes et nous donner les valeurs qui sont les nôtres aujourd'hui !!
Continuez mes amis à nous raconter l'histoire de ces hommes et femmes exceptionnels !! Amitiés DANY

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Re: Le Père Michel FABRE
Envoyé par: georges-michel (Adresse IP journalisée)
Date: jeu. 6 janvier 2011 23:22:08

J'ai retrouvé dans le texte d'une conférence "en feuilletant les pages ignorées de l'histoire de Fès" prononcée le 4 mai 1951 devant l'association des "Amis de Fès" par le père Henry Koelher quelques éléments sur la présence franciscaine à Fès.

Il semble que des franciscains arrivèrent à Fès le 2 juillet 1672, en provenance de Marrakech, où existaient une église et des édifices cultuels. Ces religieux furent logés dans des cabanes destinés aux captifs dans les écuries du gouverneur en médina de Fès, probablement du côté de Bab Guissa, en dessous des tombeaux mérinides (il ne s'agit pas du Jamaï ! mais on m'a montré lors de mon dernier passage à Fès, dans ce quartier, pas très loin de Aîn Azliten, un bâtiment où auraient habité "il y a très longtemps" des religieux- à revoir-).

Mais les captifs étant "logés" à Fès-Djedid, le parcours à travers les rues de la médina était délicat pour les Pères. Les religieux tentèrent d'acheter une maison au mellah ce qui déchaina presque une émeute. Les Pères optèrent donc pour le "home-working" ! et demandèrent à loger en prison avec les captifs.
Les différents témoignages, parfois contradictoires, paraissent cependant désigner la casbah des Cherarda comme le principal lieu de détention des captifs chrétiens et c'est donc là qu'en 1672 les franciscains vinrent habiter et édifièrent la première église de Fès -même si le terme est un peu solennel- qui fût dédiée à l'Immaculée Conception.

Voici ce que dit le Père Koehler " Les franciscains reçurent en partage un espace d'environ 8m de long sur 3 ou 4 de profondeur. C'est la qu'ils installèrent ce qu'ils appelèrent religieusement "le couvent". Aidés par les captifs ils construisirent un étage à leur cabane: le bas servait de chapelle, au dessus se trouvait la cuisine, le réfectoire et les trois cellules....la chapelle offrait cette particularité que l'autel se logeait dans une excavation que l'on avait pratiquée dans l'épaisseur de la muraille, deux portes le dissimulaient pour éviter toute profanation possible. Le dimanche on les ouvrait ainsi que celles de la chapelle, et tous les captifs pouvaient de sorte assister aux offices. Peu après, grâce à des esclaves ingénieux on fit une chapelle de terre et de briques et l'on eut "une bonne chapelle d'ermitage".

C'est là dans ce réduit que l'on intronisa le 8 décembre 1672 la Patronne de l'humble église.
Il est intéressant de noter que la tolérance religieuse était bien réele même si de temps en temps un religieux était coupé en rondelles et/ou servait de casse-croûte aux lions!

A côté des offices réglementaires les franciscains avaient en charge l'école et l'hôpital. Ils instruisaient les enfants nés en captivité, ainsi que certains adultes. Ce qui est plus surprenant c'est que des marocains de bonnes familles demandèrent et obtinrent d'inscrire leurs enfants. C'était les débuts de l'école publique et gratuite !
On remarquera aussi que la fréquentation des captifs ne posait pas trop de problèmes à moins que les bourgeois fasi n'aient trouvé un certain plaisir à s'encanailler.

L'hôpital....ancêtre de l'hôpital Cocard de Cristiani !...était lui fort modeste. Un religieux, plus infirmier que les autres avait organisé dans une baraque quelques lits avec à l'occasion des draps et des couvertures, et avec une "caisse" à pharmacie parait aux urgences et Dieu devait donner un coup de pouce pour faciliter les guérisons.

Le" couvent " et "l'église" des Chérardas se sont maintenus pendant 4 ans et en 1676 les franciscains furent chassés.....par des religieux trinitaires et se réfugièrent à Ceuta quelques années.( en fait la présence des trinitaires à Fès dura à peine un mois !!)

Les franciscains reviennent à Fès en 1684. Mais déjà une bonne partie des captifs avait été transférée à Meknès, un seul Père s'établit à Fès au début mais l'église des Chérarda reprend du service.
On rapporte même qu'en 1687, la vierge serait apparue à une jeune marocaine et l'aurait engagé à devenir chrétienne: elle reçut le baptême sous le nom de "Marie des Anges".

En 1690, sur un registre des mariages, à la date du 28 mai (tu ne l'as pas photographié celui-là Gilles) un religieux indique que la cérémonie eut lieu « dans notre hospice de Ste Anne » et on retrouve mention de cette église dédiée à Ste Anne dans un document de 1712 qui précise « à Fès Djedid, là où depuis de longues années on a eu un hospice au milieu de nombreux captifs ». L'église semble avoir changée de nom

La vie des franciscains n'était pas un long fleuve tranquille et en 1711 ils faillirent être définitivement chassés de leur église des Cherarda par une émeute d'habitants voisins qui revendiquait les lieux. Le gouverneur mit fin à l'émeute mais conseilla aux religieux de chercher temporairement une autre demeure. Ils se sont alors installés, en médina, dans la maison d'un des captifs de la poudrerie. Ils finirent par acheter la maison voisine de celle du captif et les choses s'étant arrangées à la Casbah des Cherarda, le dimanche il y avait une messe dans l'église des Cherarda, et une autre dans la maison de la médina....dont le lieu reste imprécis si ce n'est qu'elle était proche d'un oued.

Le nombre des captifs diminuant à Fès, les services religieux eurent lieu surtout dans la résidence de la médina.
A partir de 1728, on n'a plus de renseignement sur la mission de Fès. A partir de 1790, les chrétiens ne sont plus au Maroc « en odeur de sainteté » et les religieux sont expulsés: sont évoqués les départs des religieux de Marrakech, de Meknès et de Tétouan, mais on ne mentionne pas ceux de Fès; ils avaient dû quitter la ville il y a bien longtemps.

La bure franciscaine réapparut à Fès le 29 décembre 1911 avec le Père Michel Fabre.

Je n'ai jamais rien lu sur l'emplacement possible de cette église de la médina du début 1700; le Père Koehler a écrit en 1934 un volumineux (230 pages)et très documenté ouvrage intitulé "l'Eglise chrétienne du Maroc et la mission franciscaine 1221-1790", il ne précise jamais l'emplacement de l' église de la médina.
Certains ont parlé d'une église située en face de la chapelle St Michel mais historiens et franciscains n'ont jamais confirmé cette hypothèse.
Une autre version rapportait que certaines synagogues du mellah étaient des églises "reconverties" et donc que les premières églises étaient situées dans le futur mellah, mais cette hypothèse est en contradiction avec la date de création du mellah un siècle avant la date proposée pour l'ouverture des éventuelles églises

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Re: Le Père Michel FABRE
Envoyé par: georges-michel (Adresse IP journalisée)
Date: mer. 19 janvier 2011 22:21:08

A propos de la tombe des franciscains à Dar Mahrès sur laquelle sont inscrits les noms du Père Philippe Pimbert et du Père Michel Fabre j'ai trouvé les infos suivantes:

- le 1er novembre 1950 après l'office célébré à Dar Mahrès "le curé se rend sur la tombe de Philippe Pimbert" aucune mention du Père Fabre.
- le 17 avril 1951, au cimetière de Dar Debibagh, lors de la cérémonie commémorative des émeutes de 1912, le clergé se rend sur la tombe du Père Michel Fabre.

A cette date là, le Père Fabre était toujours à Dar Debibagh

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Re: Le Père Michel FABRE
Envoyé par: georges-michel (Adresse IP journalisée)
Date: dim. 17 avril 2011 21:20:12

Quelques informations complémentaires sur la Chapelle St Michel:
- la maison des télégraphistes a été louée dans un premier temps et c'est le Père Dominique Bouchery, qui prit la suite du Père Fabre, qui y célébra la première messe à minuit, pour Noel 1912.
- cette chapelle allait servir à la vie paroissiale jusqu'en 1957.
- elle avait pour curés au début les aumôniers militaires. Après le Père Bouchery il y eut le Père Malaussena qui en 1914-1915 enregistra 8 baptêmes,6 mariages et 63 enterrements.
- ensuite, le Père Théophile Lamperti lui succéda et dût accepter la division de sa paroisse en deux, l'expansion de la population catholique en VN nécessitant la fondation d'un lieu de culte plus proche.L'église St François sera achevée en 1921.
- en 1920 le Père Gérard Savary prenait possession du poste d'aumônier et le gardait jusqu'en 1929. Il accompagnait les troupes en colonne et était "baptisé" l'homme à la chéchia.
Pendant ses absences il a été remplacé par les Pères Aurélien Jaouen, Alexandre Digard ou Réginald Maillard dont les plus anciens d'entre nous se souviennent peut-être.
- le Père Ange Koller, berbérisant distingué (et auteur d'un livre remarquable "Essai sur l'esprit du berbère marocain") occupe la place de 1929 à 1933 et créé une sorte d'école du soir "Le Foyer" où de jeunes fasi venait en toute liberté apprendre le français, lire ou simplement parler. Comme Ange Koller n'était pas aumônier militaire on lui adjoint le Père Bonaventure Hermentier.
- en 1933 le Père Pedron remplace le Père Koller et tient la paroisse pendant 9 ans et y installe des mouvements de jeunesse (JOC, scouts).
- se succèdent ensuite les Père Barea, Decroux, Hunot et Colpin qui resta jusqu'en 1957 à la fermeture de la paroisse.
- De 1957 à 1960 ce lieu hébergea le Père Dominique Reboul, aumônier de l'hôpital Cocard.

C'est le général Gouraud qui a offert l'autel de l'église et qui a été témoin du premier mariage célébré à la chapelle St Michel.

Enfin le Frère François Muzard dans" 1908-1978, 70 ans de mission franciscaine au Maroc", dans un petit chapitre consacré au Père Michel Fabre écrit "le corps du Père Michel Fabre repose maintenant au cimetière européen de Fès, où il a été ramené depuis le petit cimetière de la médina".
Cette affirmation semble confirmer que Michel Fabre serait bien enterré à Dar Mahrès comme mentionné sur la tombe des Pères franciscains mais la référence au petit cimetière de la médina me parait inexacte car Michel Fabre était enterré à Dar Dbibagh, cimetière fermé au milieu des années 1970; le transfert a dû avoir lieu à ce moment là.

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Re: Le Père Michel FABRE
Envoyé par: georges-michel (Adresse IP journalisée)
Date: sam. 24 janvier 2015 12:01:06

J'ai trouvé cette photo légendée " maison où a été tué le Père Fabre, au cours de l'insurrection de Fès (avril 1912) " .

Cette maison était l'Hôtel de France, situé en médina, près de la médersa Bou Inania, dans une petite rue entre les deux Talaa. Elle est d'ailleurs à vendre !

La photo n'est pas datée, mais le franciscain de droite est certainement le Père Dominique Bouchery ( comparaison avec d'autres photos) qui a succédé au Père Michel Fabre



Pièces jointes: Hotel de France.jpg (417.2KB)  
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Re: Le Père Michel FABRE
Envoyé par: jpb (Adresse IP journalisée)
Date: dim. 25 janvier 2015 15:01:24

Excellent Georges ! La recherche de la date démontre par recoupement toute l'histoire que tu maitrises su Fès.
Sinon je pense que tout va bien pour la rédaction dans le Forum. On a terminé vendredi avec la consolidation du site et j'ai du me former à d'autres logiciels. C'est bon maintenant !

Jean-Pierre

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